Séminaire du Pr Delion sur la psychothérapie institutionnelle.

Publié le par hypocampe2011.over-blog.com

 

Séminaire du 28 mars 2011 Professeur Pierre Delion.

Utopsy.

 

Lors de ce séminaire, est évoquée la psychothérapie institutionnelle.

L'association Utopsy existe pour la formation en psychiatrie. Pour faire le lien entre la psychanalyse et les soins psychiatriques, il existe un séminaire mensuel qui est gratuit et accessible à tous..

 

Les créateurs du lien entre la psychothérapie institutionnelle et la psychanalyse sont François Tosquelles, Félix Guattari et Jean Oury.

La psychothérapie institutionnelle date d'après la Guerre 39-45. « Le club » en est une structure fondamentale et complémentaire. C'est la psychanalyse lacanienne qui en est le socle théorique.

Les lieux de cette façon de soigner sont : l'hôpital de Saint-Alban-sur Limagnole avec François Tosquelles, les cliniques de La Borde avec Jean Oury et de La Chesnaie avec Claude Jeangirard.

 

Pierre Delion parle de constellation transférentielle et de costume transférentiel, il est praticien du packing.

 

Lepackingest une méthode de soins utilisée dans le traitement d'enfants autistes, de psychotiques, des anorexiques surtout lors d'automutilation. Cette méthode est controversée.

La technique du packing est basée sur le réchauffement thermique cutané rapide obtenu en enveloppant le corps de l’enfant dans des serviettes de bain mouillées froides. Ces tissus d’une température proche de +10 à +15°C en début de séance se réchauffent très rapidement pour avoisiner la température du corps jusqu’à la fin de la séance.

Le packing n'est pas une méthode de soins très utilisée et ne peut être considérée comme une méthode d'usage courant en pédopsychiatrie.

 

La "constellation transférentielle" ce sont les fragments projetés d’un sujet psychotique. Il s'agit de réunir ce qui a pu être l’objet d’un investissement partiel du sujet en question, que ce soit les soignants qu’il apprécie, mais aussi ceux qui le persécutent... etc, de façon à approcher les différents niveaux qui constituent la réalité psychique projetée du patient sur son entourage. Par ce type de construction du rapport au monde, le patient actualise dans le "transfert institutionnel" les modalités selon lesquelles il s’est lui-même construit. Toute la difficulté consiste à repérer et réunir ces investissements hétérogènes (Pierre Delion).

 

Pierre Delion évoque ensuite son parcours et la sectorisation en psychiatrie qui s'est mise en place dans les années 1972-1974. Il parle du service de Jacques Henri et des débuts de la psychiatrie de secteur.

 

Le caractère humain ne se résume pas à la molécule. En ce moment en psychiatrie, il existe une déconstruction des valeurs humaines.

 

François Tosquelles et Lucien Bonnafé, de 1934 à 1939 ont mis en lien l'institution et la psychanalyse. Ils ont travaillé ensemble. De leur travail est née une bande de Moebius entre la psychothérapie institutionnelle et la sectorisation.

 

Dans le vocabulaire de Jacques Lacan : « 1962/63 – Séminaire : L'angoisse - 09/01/63 - Qu'est-ce qui fait qu'une image spéculaire est distincte de ce qu'elle représente ? C'est que la droite devient la gauche et inversement. - Une surface à une seule face ne peut pas être retournée. - Ainsi une bande de Mœbius, si vous en retournez une sur elle-même, elle sera toujours identique à elle-même. C'est ce que j'appelle n'avoir pas d'image spéculaire. »

 

Lucien Bonnaféest un psychiatre désaliéniste français qui a élaboré et mis en place la politique de secteur psychiatrique qui consiste à prendre en charge les patients près de leur domicile dans un secteur géographique déterminé par le nombre d'habitants.

En 1930, il participe au groupe surréaliste de Toulouse avec Gaston Massat, Elise Lazes, Jacques Matararsso, Gaspard Gomis et Jean Marcenac.

  • 1934 : Pour une participation à une manifestation anti-fasciste interdite, il est condamné à 2 ans de prison avec sursis.

  • 1939-1944 : Il participe à la mise en place de la psychothérapie institutionnelle avec le « groupe du Gévaudan ».

  • 1946 : Il participe au colloque de Bonneval organisé par Henri Ey avec Jacques Lacan, Julien Rouart et Sven Follin.

  • 1949 : Il adhère au Parti communiste français.

  • 1954 : Il participe à la revue Vie Sociale et Traitements destinée aux formations des infirmiers en psychiatrie à soutenir le courant désaliéniste.

  • 1959 : Le groupe de Sèvres crée la sectorisation.

  • 1961 : Par la publication des 27 opinions sur la psychothérapie, le rôle thérapeutique de l'infirmière en psychiatrie est souligné.

 

Pierre Delion nous dit que « la condition des possibilités de la rencontre avec le patient nécessite une philosophie de travail pour fonctionner ». Le concept opératoire pour changer les pratiques asilaires est la philosophie de la psychothérapie institutionnelle.

Il explique qu'il existe un risque depuis la sectorisation, c'est d'idéaliser l'extra-hospitalier.

Il pense que la psychiatrie de liaison est un leurre.

Pierre Delion dit que pour traiter un psychotique, il faut le voir 5 fois par semaine en consultation psychanalytique d'1h/jour. La reconstruction du schizophrène se fait pendant les séances et entre les séances, le travail analytique continu.

François Tosquelles parle de transfert multiréférentiel et Jean Oury parle de transfert dissocié pour la prise en charge des psychotiques. Ceci faisant référence à la première relation au monde dans l'enfance avant la relation objectale.

Le psychanalyste ne peut être seul face à la psychose.

L'hôpital peut être différent en donnant une réponse différente en fonction de la philosophie des gens qui sont là.

Il faut se mêler d'habiter les institutions pour les humaniser. C'est l'équipe qui participe à la création d'une institution.

 

Le psychotique ayant un « transfert dissocié », il est nécessaire de lui proposer des possibilités multiples de transfert. Par conséquent, il faut alors la création de lieux, d'institutions variés, il faut assurer au patient la liberté de circulation, pour qu'il puisse aller d'un lieu à un autre. Dans le même esprit, les soignants ne sont pas recrutés spécifiquement dans le secteur sanitaire, certains sont artistes, agriculteurs. La « distinctivité » augmente d'autant nous dit Jean Oury. À la place d'un ensemble de personnel ayant la même formation, la même expérience, se trouvent des personnes ayant chacune un vécu propre. C'est autant de possibilité de points communs, de rencontres, et de transferts, pour les patients qui, dans leur immense majorité, sont issus d'un autre milieu que la psychiatrie. Avec la renommée grandissante de Félix Guattari, des philosophes et autres intellectuels vont s'engager dans le collectif soignant.

Cependant, à l'heure actuelle, avec l'évolution politique, ceci est de moins en moins possible, les organismes de tutelles imposant de plus en plus l'embauche d'infirmiers. Exit les philosophes et les psychanalystes.

Il y a par ailleurs, et repris notamment d'Hermann Simon, la volonté que le patient soit partie prenante, activement, de ses soins. Cela peut se traduire par un investissement dans différentes institutions organisant le lieu de soins (ateliers, clubs, prise en charge du ménage, etc.). En contrepartie l'établissement verse régulièrement une somme, évaluant le travail réalisé, à une association interne, regroupant les soignés et les soignants.

Dans le premier numéro de la revue Psychothérapie institutionnelle, on voit les auteurs de l'article « Le contre-transfert institutionnel » (Chanoit Pierre-François, François Gantheret, Philippe Réfabert, E. Sanquer, Paul Sivadon, « Le contre-transfert institutionnel », in Psychothérapie institutionnelle, Paris, premier numéro, 1965, pp. 23-34) se débattre avec la question.

À propos d'une définition de « la notion d'institution », ces derniers écrivent « Il faut avouer, avec Ginette Michaud que cette définition est difficile, que la notion même est controversée ». Les auteurs font appel à différentes propositions. Ils citent Georges Gurvitch qui la juge « encombrante et nuisible », Gilles Deleuze pour qui « les institutions sont des systèmes organisés de moyens destinés à satisfaire les tendances ». Claude Lévi-Srauss et Jean-Paul Sartre sont également convoqués.

Les théoriciens de la psychothérapie institutionnelle sont avant tout des psychiatres, des psychanalystes, l'institution, elle, relève de la philosophie, du droit et de la sociologie. Aussi n'est-ce pas si étonnant qu'en tant que psychiatres, ils aient rencontré des difficultés avec cette notion qu'allaient travailler un peu plus tard des sociologues, philosophes de formation...

 

« Quand un atelier marchait bien, je me souviens qu’avec Félix Guattari on restait sur la réserve. Parce que dès qu’il y a mise en place d’une instance, ou d’un atelier, ceux qui y sont ont tendance à se regrouper, à se coller les uns aux autres dans un système de cooptation imaginaire, clos. Et il y a création d’un territoire. C’est une tendance dite naturelle. Plus on travaille bien dans un atelier, plus ça se ferme. Ce que j’appelle « la loi » doit intervenir pour casser ces territoires, ou du moins pour les ouvrir.[…] Donc, il y a ce tas de gens. L’institution, quand ça existe, c’est un travail, une stratégie pour éviter que le tas de gens fermente, comme un pot de confiture dont le couvercle a été mal fermé. La mise en place d’un club, c’est un opérateur pour éviter que ça fermente, sans se contenter de résoudre le problème par le cloisonnement et l’homogénéité. C’est pour ça que ce qu’on a appelé la psychothérapie institutionnelle – j’ai du mal à prononcer ce mot – est une instance critique de la société dans sa globalité. Eviter la dégradation d’un tas de gens par non-vigilance, ça demande du sérieux. Le sérieux, disait Kierkegaard, ça ne peut pas se définir. Le sérieux, c’est le sérieux.[…] Ce genre de travail est une façon de singulariser les gens qui sont là, de transformer, comme disait Gabriel Tarde, la foule en public, d’avoir affaire à l’hétérogène sans essayer de l’écraser. Ça, c’est l’exercice de la loi. Ça ne peut venir de l’établissement, qui ne peut produire que des règles. C’est un travail énorme parce que la loi, comme disait Jacques Lacan, c’est le désir. C’est ce qui structure l’ambiance, ce qui autorise une attention commune, une sympathie, une « attitude collective ». La mise en place concrète se fait par une structure de partage.« Partage est notre maître », comme disait Pindare. Si seulement… » Jean Oury.

 

C'est donc l'équipe qui participe à la création d'une institution. Il faut un pare excitation. Il faut fabriquer un opérateur pour traiter la psychose. Il faut un traitement général qui est les bases de l'institution et un traitement singulier, c'est à dire adapté à la singularité de chaque patient.

Pierre Delion conseille de lire « Le temps des glaciations » de Salomon Resnik. Pour Salomon Resnik le transfert est double plutôt qu'un transfert et un contre-transfert.

 

La place de tous les membres d'une institution est importante dans les soins psychiques.

 

Découlant des théories psychanalytiques, la psychothérapie institutionnelle est une pratique psychiatrique qui recherche avant tout, pour le préserver, le côté humain de la relation.

Impliquant le sujet dans une vie collective active et ordonnée, elle le met ainsi, bien qu’il soit malade mental, au centre de sa guérison.

 

L’idée de base est de se servir du milieu hospitalier comme facteur thérapeutique.

"La psychothérapie institutionnelle part du principe que la psychose existe, que le transfert existe et enfin que le transfert psychotique existe" (Pierre Delion).

Les mouvements affectifs qui se créent entre les patients et les gens de leur entourage (soignants, administratifs, ouvriers...) sont reconnus et recherchés. Les échanges ne se font pas qu'avec une seule personne, mais partout où le patient entre en relation : le transfert englobe alors l’ensemble de la situation institutionnelle et devra donc être appréhendé en tant que tel dans des espaces de parole institués. François Tosquelles crée à cette fin le concept de "contre-transfert institutionnel".

Reconnaissant à chaque être humain sa singularité, la psychothérapie institutionnelle s'efforcera de construire pour chaque patient une thérapeutique sur mesure. Car à travers l'institution, c'est réellement dans la rencontre et la relation avec le patient que la thérapie se développe.

 

Pierre Delion nous dit que pour développer une stratégie thérapeutique, il faut permettre la possibilité de la constellation transférentielle des gens qui sont en contact authentique avec le patient. Ce sont les effets de transfert et de contre transfert qui sont thérapeutiques mais bien entendu tout ceci est inconscient. C'est le rassemblement de contre transfert des soignants qui soigne le patient. L'équipe doit pouvoir faire pare-excitation historiale au sens d'Heidegger. Le clivage est nécessaire dans l'équipe de soins et entre l'intra et l'extra hospitalier. L'échange de ces clivages en narration des troubles du patient par l'équipe soignante, c'est la surface d'inscription du patient.

 

C'est l'élaboration et la perlaboration qui soignent. C'est à dire saisir quelque chose d'un sens pour le patient.

 

Le mot perlaboration est un néologisme inventé pour traduire le terme allemand : Durcharbeitung (Travail "à travers").
Pour mieux comprendre son sens profond, on peut le voir comme la contraction de parélaboration.
Il désigne une élaboration fondant le travail psychanalytique et visant la suppression du symptôme.

 

Le rôle de l'analyste dans la perlaboration est multiple :

  • au niveau de l'attention flottante, l'analyste repère les mouvements psychiques particuliers,

  • au niveau de la reconstruction du passé, l'analyste fait appel à son raisonnement, ses théories,

  • au niveau de l'interprétation des rêves, l'analyste propose des interprétations - qui peuvent d'ailleurs se révéler fausses,

  • au niveau du contre-transfert, l'analyste symbolise ce qu'il ressent, met en mots ce qui provient d'un transfert qui ne parvient pas à se dire,

  • la perlaboration de l'analyste peut se manifester comme théorisation flottante au travers de comptes-rendus d'analyse.

L'échange multidisciplinaire amène une fonction contenante. C'est retrouver un peu de sens avec ce que nous échangeons avec le patient. Notre attitude interne change quand nous trouvons un sens authentique dans la relation transférentielle avec le patient.

« Il faut être adaptable sans être trop déformable » Jean Oury.

Cette fonction malléable du soignant est possible si le patient sait que l'équipe soignante peut se déformer, sans nous transformer, sans nous effondrer.

 

Un fonctionnement d'équipe, cela se travaille. Exemple : Faire un travail sur l'accueil des patients.

L'accueil se retrouve dans la fonction Balint.

 

Une réflexion d'équipe est indispensable pour pouvoir travailler dans une continuité.

C'est aux idées profondément originales de Michael Bálint, dans son exercice et sa pratique du travail psychanalytique, que l'on doit la création des "groupes Balint" : outils importants de supervision et de réflexion sur la relation médecin-malade - et, par extension, de régulation chez tous les professionnels de santé et professionnels de la relation. Les groupes Balint ont été à l'origine du courant des groupes d'analyse des pratiques que l'on trouve aujourd'hui dans le monde de la santé, de l'éducation, du travail social et de la formation des adultes.

La notion d'équipe est à travailler, c'est un sujet collectif malléable qui va accueillir le patient.

La psychanalyse anglaise dit qu'il faut utiliser l'observation dans un premier temps pour laisser s'instaurer la transfert.

La notion de fonction phorique de Winnicott, c'est à dire porter les patients tout le temps qu'ils ne peuvent se porter eux-mêmes, se soucier d'eux, s'occuper d'eux.

 

C’est ainsi que la succession des accueils, lors de toute la durée d’une prise en charge, va favoriser l’ancrage de LA FONCTION PHORIQUE : « tout ce qui est nécessaire pour définir une scène sur laquelle le patient va pouvoir jouer sa problématique, souvent à son insu dans un premier temps », que l’on peut également résumer par l’engagement d’une équipe à porter et accompagner un patient, car la personne psychotique est dans un tel état de dépendance qu’elle a besoin longtemps, voir toujours besoin de portage.

 

Il faut se laisser envahir par les objets investis des patients.

La fonction sémaphorique, c'est que je deviens le porteur des objets qui fait souffrir le patient. Cette fonction sémaphorique s'instaure dans les réunions d'échanges sur le patient. La fonction métaphorique amène du sens qui peut aider ensuite le patient.

 

« La métaphore, comme le symbole, donne accès à la vie intersubjective et intrasubjective. L’étymologie de ce mot implique la notion de changement et de transport. " Il s’agit donc de transfert de sens d’un mot à l’autre, par une analogie qui le sous-tend et qui reste une sous- similitude abrégée et une comparaison en un mot "…

La métaphore généralement citée est celle du lion : Achille est courageux comme un lion ou le lion Achille. Le rapprochement prend ainsi une valeur iconique, très utilisée dans la publicité actuelle. Dans le domaine scientifique, on admet généralement que la métaphore doit avoir valeur paradigmatique. Ainsi, dans le domaine du développement du jeune enfant, la " situation étrange " est paradigmatique de la séparation d’avec la mère.

La fonction métaphorique est très utilisée dans le langage poétique. " Comparaison, analogie, symbole, allégorie n’ont été souvent dans le passé que des moments et les formes sclérosées d’une écriture, mais elles irriguent le romantisme d’un sang nouveau  ".

A la suite de Lacan, on a insisté sur la condensation et le déplacement qui s’y observent, comme pendant le travail du rêve. Toutefois pour Lacan la métaphore est inconsciente et donc structurée comme un langage, alors que pour Pasche, ce n’est pas le symbole verbal qui se déplace et se condense, mais " c’est le sujet qui tente un compromis entre pulsions et défenses en utilisant sa propre histoire ".

La métaphore du miroir.

Winnicott utilise beaucoup les métaphores dans ses textes mais malheureusement leur valeur est un peu lâche et donne souvent lieu à une exploitation trop facile. Il me semble qu’il peut en être ainsi de l’objet transitionnel transformé bien vite en " zone transitionnelle " " celles de la culture et de la religion  ".

Que dire du " holding " qu’on traduit trop facilement par " portage ", alors que pour Winnicott il s’agit d’un terme qui signifie " soutenir " , " contenir " , " retenir ", etc.

Lorsque Winnicott parle de la haine dans le contre-transfert, on sait qu’il en donne pour exemple la haine de la mère pour son bébé. » De Serge Lebovici.

Il est nécessaire d'avoir une position politique pour la clinique.

Quand la politique prend le pouvoir sur la clinique alors arrive le fascisme.

 

Le 30 mars 2011, Hélène Perron.

 

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