Les essences ou les puissances spinozistes.

Publié le par hypocampe2011.over-blog.com

LES ESSENCES ET LES PUISSANCES :

L'Éthique ou la morale selon Spinoza,

Gilles Deleuze le 2/12/80 et le 9/12/80.

 

 

Le méchant, c'est une personne qui se trompe, c'est à dire qu'il fait un faux jugement.

 

Du point de vue de l'éthique, le mauvais, c'est aussi du faux. Ce n'est pas la même conception du faux, que dans le cas précédent où le faux était une détermination du jugement. En effet, un jugement est faux lorsqu'il ne prend ce qu'il n'est pas pour être.

 

Un jugement est faux lorsqu'il n'y a pas adéquation entre l'idée et la choses.

Le vrai est l'adéquation entre l'idée et la choses.

 

Il y a un tout autre sens du mot faux et qui précisément ne concerne pas le jugement.

Faux, comme manière d'être de la chose. C'est de l'ordre du sentiment.

 

Deux sens donc:

  • Le vrai et le faux comme qualification du jugement sur la chose.

  • Le vrai et le faux comme qualification de manière d'être de la chose.

 

La manière d'être de la chose est à l'être. Elle peut l'être vraiment ou faussement. Ceci est intéressant pour l'éthique.

 

ÊTRE VRAI À L'ÊTRE, c'est vraiment un mode d'existence. C'est être authentique ou inauthentique.

 

L'authentique (vient du grec), c'est celui qui tient en lui-même de manière à être vraiment à l'être. C'est une manière d'être. On éprouve pas quelqu'un, c'est ce quelqu'un qui ne cesse de se mettre à l'épreuve. C'est l'épreuve, ce n'est pas le jugement.

L'épreuve physico-chimique s'oppose au jugement moral.

Ceux qui pense dans ce sens, on les a toujours appelé des immoralistes. Ils font passer une distinction entre authentique et inauthentique. Cela ne recouvre pas la distinction entre le bien et le mal. C'est très différent.

 

Qu'est-ce que Spinoza peut bien avoir à dire aux autres ?

 

Attention, aux clivages entre le discours éthique et le discours moral.

 

Dans une morale, vous dites quelque chose, vous faites quelque chose et vous le jugez vous-même. C'est le système du jugement. Il y a un double jugement :

  •  
    • Vous vous jugez vous même,

    • Vous êtes jugé.

Juger implique toujours une instance supérieure à l'être. Cela implique toujours une instance supérieure à l'ontologie.

 

Dans une éthique, vous ne jugez pas.

Vous rapportez la chose ou le dire au mode d'existence qu'il implique, qu'il l'enveloppe en lui-même. Vous entendez un discours et vous tentez d'en comprendre le sens en vous disant : « Comment faut-il être pour dire cela ? » « Quelle manière d'être faut-il pour faire cela ? »

Vous recherchez alors le mode d'existence enveloppé et non pas les valeurs transcendantes.

C'est l'opération de l'immanence.

Cela peut être aussi dans le sens positif, quand on admire quelqu'un dans ses actes en disant : « Je n'aurais jamais cru qu'il était capable de faire cela ».

 

Spinoza nous demande : Qu'est-ce que peut un corps ?

On ne sait jamais d'avance ce que quelqu'un est capable corps et âme. On ne sait pas, il y a toujours des surprises.

 

Spinoza nous dit : Qu'est-ce que tu peux toi dans telle ou telle situation ? Qu'est-ce que tu peux toi dans ton corps ?

 

L'hypothèse, c'est l'éthique, le discours de l'éthique :

L'éthique a deux caractères. Elle nous dit les existants ont une distinction quantitative de plus et de moins et c'est par là qu'ils se distinguent dans leur singularité et nous. Elle dit aussi les modes d'existence ont une polarité qualitative.

 

Ils existent deux grands modes d'existence avec toutes sortes de variantes.

 

Entre deux personnes, entre une personne et un animal, entre une personne et une chose, il y a éthiquement, c'est à dire ontologiquement qu'une distinction quantitative.

 

De quelle quantité s'agit-il ?

Qu'on nous suggère que ce qui fait le plus profond de notre singularité, que je sois ceci et pas cela, c'est quelque chose de quantitatif.

En effet, il s'agit de définir les gens, les choses et les animaux par ce que chacun peut.

 

Une proposition philosophique est bonne lorsqu'elle vous paraît évidente. Quand on se dit évidemment, je le savais, j'y ai pensé depuis toujours. Et en même temps, il faut que ce soit la proposition la plus insolite et la plus inouïe du monde. La philosophie, c'est l'art à la lettre.

 

Les personnes, les animaux et les choses se distinguent parce qu'ils peuvent faire c'est à dire qu'ils ne peuvent pas faire la même chose. Exemple : un être humain ne peut pas voler comme un oiseau.

 

La vison morale du monde, un moraliste définit l'homme parce qu'il est en droit. C'est cela l'essence, ce que la chose est en droit, c'est son essence. Un moraliste définit l'homme par le raisonnable, c'est son essence.

 

Un éthiciens ne définit jamais l'homme par le raisonnable.

Spinoza définit l'homme parce qu'il peut corps et âme.

 

Ce qu'ils peuvent, c'est à dire qu'ils ont plus ou moins de puissance. Cette quantité plus ou moins différentiable dont je cherchais la formule, c'est la puissance.

Le discours éthique ne cessera pas de nous parler non pas de l'essence mais de la puissance. A savoir, les actions et les passions dont quelque chose est capable.

Non pas, ce que la chose est mais ce qu'elle est capable de supporter, ce qu'elle est capable de faire.

 

S'il n'y a pas d'essence générale, c'est qu'à ce niveau de la puissance tout est singulier. On ne sait pas d'avance alors que l'essence nous dit d'avance ce qu'est un ensemble de chose par exemple ce que sont les hommes, ce que sont les choses, ce que sont les poissons...

 

L'éthique nous dit rien de tout cela, elle ne peut pas savoir.

Un poisson ne peut pas, ce que le poisson voisin fait ; un homme ne peut pas, ce que l'homme voisin peut.

Il y aura donc une distinction infinie de la quantité de puissance d'après les existants.

 

Les choses reçoivent une distinction quantitative parce qu'elles sont rapportées à l'échelle de la puissance.

Bien après Spinoza, Nietzsche lancera le concept de volonté de puissance.

 

La puissance, ce n'est pas ce que je veux par définition, c'est ce que j'ai.

 

C'est cela qui me situe dans l'échelle quantitative des êtres.

La puissance n'est pas l'objet de la volonté. C'est le contraire.

 

C'est la puissance qui est sujet de la volonté.

C'est à dire, c'est d'après la puissance que j'ai que je peux faire ceci ou cela.

C'est définir les choses, les animaux et les êtres non pas par essence mais par la puissance effective qu'ils ont.

C'est la question :

Qu'est-ce que peut un corps ? Qu'est-ce que tu peux toi ?

 

C'est bien différent de la question morale : Qu'est-ce que tu dois en vertu de ton essence ?

 

L'éthique, c'est qu'est-ce que tu peux, toi en vertu de ta puissance ?

 

Le 20 décembre 2010,

Hélène Perron.

Publié dans Philosophie

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